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A PROPOS DES FEMMES
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27 juillet 2010

A PROPOS SUR LA VIOLENCE....

Depuis plusieurs années, des observateurs attentifs évoquent une « recrudescence de la violence » dans le monde contemporain. Cependant, on aurait du mal à trouver dans l’histoire une période ou une civilisation exempte de toute violence : nous semblons devoir cohabiter avec elle, en la générant et en la subissant tour à tour.

Néanmoins, en dépit de sa quotidienneté, la violence nous surprend et nous apeure sans cesse. Pourquoi ? C’est-à-dire exactement : si nous engendrons la violence, pourquoi la craignons-nous et au nom de quoi condamnerions-nous ce qui semble faire partie intégrante de notre être ?
Afin de répondre à ces questions, nous tenterons d’expliquer précisément ce qu’est la violence pour ensuite cerner dans quelle mesure il est possible de prétendre qu’elle est inhérente - ou non - à une certaine « nature humaine ».

A priori, nous pourrions définir la violence ainsi : elle est l’usage de la force . Cependant, en y regardant de plus près, nous pouvons clairement nous apercevoir que le vent ou le dictateur ne sont pas violents de la même manière : il existe une intention de la violence chez le dictateur qui est totalement absente du phénomène du vent. Autrement dit, le vent, s’il détruit par la force, ne désire nullement détruire quoi que ce soit ; il le fait, c’est tout.
En fait, il semble que ce soit l’homme qui personnifie le vent, lui attribuant une intention, lorsqu’il déclare le vent violent. Le vent ne saurait en effet faire usage de la force, puisqu’il est lui-même une force. Affirmer que le vent est violent relève donc d’un abus de langage.

Dès lors, nous pourrions supposer que seuls les animaux et l’homme sont capables de violence, dans la mesure où seuls, ils feraient littéralement usage de la force.
Pourtant, une différence de taille existe entre la violence animale et la violence humaine : les animaux n’ont qu’un pur rapport instinctif avec la violence (ils se battent parce qu’ils sont en rut, ou bien pour se nourrir), mais demeurent dans un comportement statique et immuable vis-à-vis d’elle. Seul l’homme est capable de créativité et d’imagination en la matière ; l’histoire des appareils de torture suffirait amplement, s’il était nécessaire, à en témoigner.
C’est pour cette raison que l’homme est le seul à vouloir faire usage de la force et qu’il peut décliner la violence sur divers modes, qu’ils soient physiques ou psychologiques. Il existe donc bel et bien une spécificité de la violence humaine .

Il semble en conséquence légitime d’affiner notre définition première de ce qu’est la violence : elle est le vouloir faire usage de la force créatif , et est à ce titre essentiellement humaine.

Cependant, un nouveau problème se pose alors à nous : vouloir, c’est vouloir quelque chose, c’est tendre vers un but. Quel est donc le but de la violence ? A priori, son projet est de contraindre. En effet, lorsque je recours à la violence, je contrains toujours quelqu’un à faire ce qu’il ne désire pas.
Ainsi, par exemple, dire que je violente une porte semble être une expression inappropriée dans la mesure où, si j’ai l’intention de faire usage de la force, la porte, elle, n’a aucune intention de me résister. C’est moi qui, de nouveau, vais personnaliser la porte en déclarant qu’« elle me résiste ». Violenter, c’est donc toujours violenter quelqu’un, c’est-à-dire le contraindre à abandonner son désir au profit du mien.

Nous parvenons dès lors à une définition définitive de la violence : elle est le vouloir faire usage de la force créatif, à des fins coercitives. Dans ce cadre, il est à noter que je peux aussi me contraindre moi-même, c’est-à-dire que je peux opposer un de mes désirs à un autre de mes désirs, afin de le faire taire : c’est alors que « je me fais violence ».

La violence apparaît donc comme le propre de l’homme : c’est par lui qu’elle est générée, et c’est encore à lui qu’elle s’adresse. Cependant, ce dernier la redoute et la fuit, créant nombre de lois ou de dogmes visant à s’en protéger. Cette situation semble paradoxale : la violence ne va-t-elle donc pas de soi dans le comportement humain ?
Ce qui caractérise l’homme est qu’il est un être de désirs. Or, la violence naît de la confrontation de désirs antagonistes des hommes entre eux. Autrement dit, l’homme n’est pas naturellement violent, il le devient pour parvenir à la satisfaction de ses désirs. En fait, dès qu’il y a deux hommes en présence, c’est-à-dire deux volontés différentes qui s’opposent, il y a tendanciellement violence.
Or, si l’homme est un être de désirs, il est également un être raisonnable et c’est pourquoi, parallèlement, il redoute la violence d’autrui qui peut s’emparer de son désir le plus cher : son désir de vivre. C’est ce désir de vivre, se transformant, face à la violence d’autrui, en crainte de la mort (à l’image du conatus de Spinoza), qui pousse l’homme à pactiser : je renonce à mon pouvoir de violence (et donc à la réalisation potentielle de tous mes désirs), à condition qu’autrui y renonce également, afin de préserver mon désir suprême, celui de vivre.

Il ne se passe rien d’autre lorsque les hommes élaborent et adoptent des lois : renonçant à utiliser leur propre violence, ils se protègent en même temps de celle d’autrui. C’est dans ce cadre que se pose le concept de la légitime violence : si l’autre reprend son droit à la violence, ai-je le droit d’en faire autant ?

Nous le voyons, la violence ne disparaît pas avec la création des lois. Les lois n’existent que pour tenter de gérer cette violence, née du fait de notre vivre en société. Ainsi, tant qu’il y aura société (et il y aura toujours société puisque l’homme est un animal social), il y a violence. Cependant, si les lois existent pour la gérer, nous pouvons dire, en quelque sorte que la morale (dogmatique) est là pour l’amoindrir. En effet, par la morale, j’intériorise depuis ma plus tendre enfance le fait que la violence est un « mal » absolu. Si cette intériorisation s’est bien déroulée, je serais plus à même de ne plus vouloir faire usage de la force.

C’est sans doute pour cette raison - entre autres - que l’opinion se lamente sur la disparition lente de la morale dogmatique : la désagrégation de la morale fait peur. Elle constitue en effet un risque aux yeux de l’opinion d’un retour à un certain « état de nature »  Cependant, craindre la disparition de la morale dogmatique, c’est méconnaître les raisons éthiques qui ont poussé les hommes  à pactiser. Elles seules sont suffisamment solides pour nous rappeler, au-delà des temps et des modes, au nom de quoi il faut respecter la loi démocratiquement reconnue de tous : pour vivre.

Parce que la violence est générée par l’homme et s’adresse à lui, elle ne fait pourtant pas partie d’une quelconque « nature humaine » : elle naît juste de la confrontation de nos désirs avec ceux d’autrui à l’intérieur du vivre en société. On ne peut espérer voir disparaître la violence. Tout au plus pouvons-nous parvenir à la gérer, grâce aux lois, et surtout grâce aux raisons éthiques qui nous poussent, au nom de notre désir de vie, à les respecter.

L’approche du sujet étant posée à propos de ses enjeux, passons à présent à ce qui pourra constituer le corps de votre devoir et/ou de votre réflexion propre...


  DISTINCTION FORCE / VIOLENCE

Comme nous l’avons vu, il  convient de distinguer la force (le vent est une force) de la violence qui est la volonté de recourir à la force pour forcer l’adhésion.
La spécificité de la violence humaine est que cette volonté est imaginative et créatrice, alors que la « violence » animale est purement instinctive.

La violence est une expression paradoxale de l'homme. Elle s'exerce contre soi-même aussi bien que dans la confrontation à l'autre, proche ou lointain. La violence est multiple, c'est celle des nations, des institutions, des employeurs, des hommes, des femmes, des jeunes, des quartiers, etc. La variété des modes générateurs de violence nous oblige à considérer ce phénomène comme inscrit au cœur de l'homme.

                        

Si ce constat nous éloigne d'une vision idéalisée d'un homme pacifié vivant des rapports sociaux harmonieux, il ne nous permet pas pour autant de sombrer dans un fatalisme cynique. Comme expression de la combativité, la violence peut soutenir la dynamique vitale ; comme agression, elle menace la vie et fragilise la cohésion sociale. La violence produit des effets délétères sur la santé. Il s'agit de les reconnaître et de tenter par l'éducation d'apprivoiser ces conduites, de construire les conditions d'un monde commun où chacun puisse tenir sa place, dans le respect de lui-même et de l'autre.

                        

L'éducation pour la santé occupe une place " singulière " et complémentaire des différentes politiques éducatives. Elle permet d'interroger les conditions du " vivre ensemble " dans un monde où la violence s'exerce au quotidien. Ses fondements éthiques, son approche méthodique offrent un cadre structurant à la prévention de la violence.

Dire que l’homme est violent par nature, parce qu’il abrite en lui des pulsions instinctives et dire que l’homme est violent parce qu’il porte en lui une somme de souffrance et de frustrations n’a pas le même sens. Dans le premier cas l’homme est considéré comme un loup qui n’est qu’artificiellement poli par la civilisation, un être dont nous devons nous méfier car la violence est en lui qui peu à tout instant resurgir.

    Par contre, si la violence n’est que le résultat d’un processus de frustration, l'expression émotionnelle d’une souffrance, alors, elle peut être ôtée du cœur de l’homme si sa racine est enlevée. Une confiance dans l’homme est possible, une conversion de la haine dans l’amour est possible. Une éducation est possible qui permettrait de résoudre la violence dans les relations, de la traiter avant même qu’elle ne puisse se manifester. 


Violences conjugales : soigner l’homme violent

Selon Michela Marzano, philosophe, chercheuse au CNRS : « À la base de la violence il y a une crise existentielle profonde qui pousse l’auteur à considérer la femme comme rien »

Quel est le profil de l’homme violent ?

Il s’agit souvent d’individus qui n’acceptent pas la « résistance » du réel, c’est-à-dire le fait que parfois la réalité s’oppose à leur désir, que parfois les autres ne répondent pas exactement à leurs demandes. Ce qui les amène à vouloir forcer ce qui résiste, à vouloir plier ceux ou celles qui leur opposent un refus. Si l’on analyse le cas particulier des violences sexuelles envers les femmes, l’on se rend compte que les violeurs forcent leurs victimes à se plier à leurs exigences, sans prendre en compte leur refus. Ce qui devient possible à partir du moment où l’autre n’est plus pris en compte comme autre, et qu’il n’est donc plus reconnu comme un être humain digne de respect : son « non » devient un « oui », car la seule chose qui compte est la volonté de celui qui exerce la violence. Les hommes violents sont souvent des individus qui n’arrivent pas à s’inscrire dans le monde et dans la société de façon satisfaisante : à la base de leur violence il y a une crise existentielle profonde qui les pousse à considérer les autres, et notamment les femmes, comme « rien », peut-être aussi parce qu’eux-mêmes n’arrivent pas à donner beaucoup de valeur à leur vie, et n’arrivent pas non plus à obtenir une considération adéquate de la part des autres (et notamment des femmes). La violence, de ce point de vue, apparaît comme le seul recours possible, comme le seul moyen pour s’imposer, en montrant ainsi à la société qu’il y a au moins les victimes de leur violence qui ont dû se plier à leur volonté et leur puissance.

Que peut-on faire pour lutter contre cette violence, comment tenter de la prévenir ?

L’éducation peut jouer un rôle très important, en permettant aux individus de prendre une mesure des effets dramatiques que la violence peut avoir. De ce point de vue, il faudrait peut-être commencer par faire comprendre aux jeunes l’existence de limites, et leur montrer comment ces limites font partie de la condition humaine. Et cela, non seulement parce que l’être humain est une créature « limitée » et « mortelle » (c’est-à-dire un être qui n’est pas tout-puissant), mais aussi et surtout parce que toute action humaine est limitée par la présence d’autrui et par son désir qui peut ne pas correspondre aux attentes que l’on a.
Autrui est toujours une limite à nos actions et à nos choix. Il existe une sorte d’infranchissable seuil qui nous sépare d’autrui, sauf à ne pas reconnaître celui-ci comme semblable à nous et, dans un même temps, à détruire la possibilité de notre humanité au sein du monde. Le problème est cependant que, aujourd’hui, on vit dans une société assez « clivée ». D’une part, on assiste à une dénonciation de la violence et à l’institution d’une espèce d’Etat de police ; d’autre part, cet Etat de police utilise à son tour une violence qui n’est pas moins extrême et qui ne prend pas du tout en compte l’humanité des coupables. D’une part, on assiste à la dénonciation de la violence des hommes vis-à-vis des femmes ; d’autre part, certaines femmes, qui se disent féministes, proposent comme seule solution à la détresse féminine l’utilisation d’un contre-pouvoir féminin.

Existe-t-il   une spécificité ethnique et culturelle de la violence masculine envers les femmes ?

Non. Surtout pas ethnique. À la limite, on peut reconnaître que certaines cultures favorisent la violence contre les femmes à partir du moment où elles ne considèrent pas les femmes comme des êtres humains à part entière. Mais au-delà de ces spécificités culturelles, la violence intervient toujours là où l’on ne prend pas en compte autrui comme ayant droit au respect et qu’on n’accepte pas que l’objet de son désir puisse se soustraire à l’envie de le posséder, de l’avaler, de le faire sien.

Pourtant certaines politiques publiques, mises en place récemment, tentent justement de répondre à cette problématique ?

  La tentative de résoudre le problème de la violence par une pénalisation toujours plus dure et plus violente des auteurs d’actes de violence n’est pas une réponse adéquate. Ce que l’on fait, en effet, c’est répondre à la violence par la violence, sans considération aucune du fait que les hommes violents sont des individus qui n’ont probablement pas pu développer chez eux ce que Freud appelle la « compassion ». Pour Freud, la compassion est l’une des « digues psychiques » qui structurent la subjectivité des individus, une « digue » qui s’oppose à la « cruauté ». Or, les hommes violents sont des individus qui, en général, n’ont pas de compassion vis-à-vis des autres, et notamment des femmes. Car les femmes, à leurs yeux, sont souvent des « choses », des « objets » dont on peut disposer complètement. Non seulement la femme n’est pas reconnue comme une semblable, comme une présence qui demande d’être respectée en tant que sujet, mais elle n’est pas non plus reconnue comme un être sensible : elle n’est plus un « autrui » qui peut contester le pouvoir et la violence des hommes. Chercher à opposer à cette violence une autre forme de violence qui réduit les coupables en « objets » contre lesquels exercer une forme de vengeance ne peut contribuer qu’à l’affirmation du principe selon lequel il y a des individus qui n’ont pas droit au respect que tout être humain mérite en tant qu’être humain.

 


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